1) INTRODUCTION  

François Doyon La Rochelle :  

Bienvenue à Sujet Capital, un balado mensuel à propos de la gestion passive de portefeuille et de la planification financière et fiscale pour les investisseurs à long terme. 

Vos hôtes pour ce balado sont James Parkyn et moi-même François Doyon La Rochelle, tous deux gestionnaires de portefeuilles avec PWL Capital. 

Nous discuterons aujourd’hui dans l’épisode #64 les points suivants : 

  • Tout d’abord, nous allons faire une mise à jour sur les performances des Magnificent Seven et des leçons potentielles à en tirer si on investit dans ce genre de titres. 

  • Ensuite, pour notre deuxième sujet, nous passerons en revue la lettre annuelle de Warren Buffet aux actionnaires de Berkshire Hathaway. 

Bonne écoute ! 

2) MISE À JOUR SUR LA PERFORMANCE DES MAGNIFICENT SEVEN : 

Francois Doyon La Rochelle :   

Pour notre premier sujet aujourd'hui, on va regarder les performances des Sept Magnifiques ou en anglais « The Magnificent Seven » et leur évolution depuis le début de l'année 2024. On va se demander si ça vaut la peine de pourchasser ces actions à succès. 

James Parkyn :  

Oui François, mais avant d'entrer dans les détails, je voudrais juste rappeler à nos auditeurs d'où vient cette étiquette accrocheuse pour ces actions très performantes. Ils se souviendront peut-être qu'au début, au milieu des années 2010, l'acronyme FANG, popularisé par Jim Cramer dans son émission Mad Money sur CNBC, a été utilisé pour désigner un groupe d'actions, à savoir Facebook (aujourd'hui Meta), Amazon, Netflix et Google (aujourd'hui Alphabet), qui affichaient une croissance et des performances spectaculaires.  Plus tard au cours de cette décennie, Apple a été ajouté au groupe et un autre A a été ajouté à l'appellation FAANG. Puis, au début de l'année 2023, le terme FAANG a été remplacé par The Magnificent Seven pour désigner un groupe de sept méga-capitalisations qui règnent sur le marché. Les compagnies qui forment ce groupe sont Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft, Nvidia et Tesla. Vous remarquerez que Microsoft et Nvidia ont été ajoutées, mais que Netflix a disparu. 

Francois Doyon La Rochelle :   

Merci, James, pour ce bref historique. Je dois dire que ce type d'étiquetage par Wall Street n'est pas nouveau puisqu'il a également été utilisé occasionnellement dans le passé pour faire référence à des groupes d'actions dominantes sur le marché. Certains se souviendront de l'ère des dot.com à la fin des années 1990 ou de la période des Nifty Fifty dans les années 1970.   Maintenant pour en revenir aux Sept Magnifiques, on a souligné dans le podcast n° 59, lorsqu’on a examiné les résultats des marchés financiers en 2023, à quel point ces actions s'étaient bien comportées en 2023. On avait alors mentionné que leurs performances en 2023 allaient de 48 % pour Apple à un extraordinaire 239 % pour NVIDIA. À l'exception d'Apple, leurs performances ont été plus de deux fois supérieures à celles du S&P 500, qui a gagné près de 26 % au cours de l'année. Ces sept titres, qui représentent près de 27 % de la capitalisation boursière de l'indice S&P500, ont contribué à près de la moitié des gains du marché américain l'année dernière. 

James Parkyn : 

Exactement, et à un moment donné, comme je l'ai souligné en janvier, au cours du premier semestre 2023, ces Sept Magnifiques ont généré tous les gains du marché américain des actions. Leur domination sur le marché en 2023 a certainement créé un engouement parmi les investisseurs et le secteur de l'investissement, ce qui a incité plusieurs fournisseurs de FNB à lancer de nouveaux produits conçus pour tirer profit d'un pari concentré sur ces actions. Seul l'avenir nous dira si ces FNB passeront le test du temps et s'ils seront des investissements rentables. Cela dit, François, comment ces sept titres se comporteront-ils en 2024 ? 

Francois Doyon La Rochelle : 

Eh bien James, en date du 24 mai, des fissures commencent à apparaître parmi les Sept Magnifiques puisque les actions de Tesla et d'Apple sont en baisse depuis le début de l'année. Les actions d’Apple sont en baisse d'environ -1,1 % et Telsa est L’un des titres les moins performants de l'indice S&P500 avec une performance de -27,9 % depuis le début de l'année. Le ralentissement de la croissance est apparemment la principale raison de leurs difficultés. 

James Parkyn : 

Qu'en est-il des cinq autres titres ? 

Francois Doyon La Rochelle :   

Les cinq autres titres contribuent toujours à la belle performance de 11,2 % de l'indice S&P500 depuis le début de l'année. Encore une fois, en date du 24 mai, Nvidia reste le leader avec une performance stupéfiante de 115,0 %, suivi par Meta à 32,2 %. Les trois autres titres performent aussi très bien avec des rendements de 25,1 % pour Alphabet (Google), 19 % pour Amazon et 14,8 % pour Microsoft.    

James Parkyn :  

François, on a beaucoup parlé du poids de ces titres dans l'indice S&P500 et de la concentration du risque. Peux-tu nous donner le poids des Sept Magnifiques aujourd'hui et des dix premiers titres de l'indice S&P500 ? 

Francois Doyon La Rochelle : 

Eh bien, le poids total de la capitalisation boursière des Sept Magnifiques dans l'indice S&P500 est actuellement d'environ 28,8 %. Le titre le plus important est Microsoft avec un poids de près de 7 %, suivi d'Apple avec un poids de 5,6 %. Il faut de noter qu'en raison de ses piètres performances depuis le début de l'année, Tesla ne figure plus parmi les 10 premiers titres de l'indice S&P500. Les dix premiers titres représentent maintenant environ 32 %.    

James Parkyn : 

Je pense, François, que cette concentration dans les 10 premiers titres est proche d'un record historique pour l'indice S&P500. Est-ce que les investisseurs doivent s'inquiéter ? 

Francois Doyon La Rochelle : 

Effectivement, James, cette concentration dans les dix premiers titres est élevée, mais elle n'est pas particulièrement inhabituelle. D'après les données de Dimensional sur le marché boursier américain qui remontent jusqu'à 1927, il y a eu des périodes où la concentration dans les dix premiers titres était aussi élevée qu'aujourd'hui. Par exemple, en 1940, les dix premiers titres représentaient 33,0 % du marché boursier américain. Des concentrations similaires ont également été observées dans les années 1930 et à la fin des années 1960. 

James Parkyn : 

Je comprends François, mais est-ce que tu penses que leur surperformance peut se poursuivre et est-ce que ces titres peuvent rester au sommet ? Michael Hartnett, directeur général et stratège en chef des investissements chez Bank of America Global Research, qui a créé l'étiquette « The Magnificent 7 », a déclaré, et je cite : « ils ont tous des positions monopolistiques/oligopolistiques, un pouvoir de fixation des prix, une capacité bénéficiaire séculaire, des bilans qui peuvent financer l'intelligence artificielle, etc. Qu'est-ce que t’en penses ? Et qu'est-ce que l'histoire des marchés boursiers nous a appris à ce sujet ? 

François Doyon La Rochelle : 

Pour répondre à ta première question, James, je ne sais pas. Est-ce que ces entreprises technologiques peuvent continuer à surperformer comme elles le font ? Est-ce qu’elles peuvent rester au sommet ? Pour moi, seul l'avenir va nous le dire. Toutefois, ce que je peux affirmer, c'est qu'historiquement, il y a toujours eu une rotation parmi les 10 premiers titres du marché boursier américain ou dans tous les autres marchés internationaux d'ailleurs. Si on remonte à l'an 2000, à l'époque, les entreprises technologiques de pointe dominaient également le marché boursier américain et faisaient les manchettes. Les dix premiers titres de l'indice S&P500 de l'époque comprenaient les géants de la technologie suivants : Microsoft, Intel, Lucent, IBM et Cisco. Aujourd'hui, ces géants de la technologie et tous les autres titres du top 10 de l'indice S&P500 ont tous disparu, à l'exception de Microsoft. IBM, qui a fait partie des plus grands titres américaines pendant plus de six décennies, occupe maintenant la 47e place de l'indice S&P500, avec un poids de 0,4 %. En 1985, le poids d'IBM dans l'indice S&P500 était de 6,4 %, ce qui est proche du poids de Microsoft dans l'indice aujourd'hui. 

James Parkyn : 

Oui François, et j'ajouterai un autre exemple classique de chute d'une action majeure hors du top 10. General Electric (GE), qui avait été dans le top 10 pendant neuf décennies, a vu son modèle d'entreprise s'effondrer pour de nombreuses raisons. Un article récent de Morningstar intitulé « 15 Stocks That Have Destroyed the Most Wealth Over the Past Decade » ou en français « 15 titres qui ont détruit le plus de richesse au cours de la dernière décennie » place GE en première position pour la destruction de richesse au cours de la dernière décennie se terminant en décembre 2023, avec une perte estimée pour les actionnaires de 55 milliards de dollars U.S. Est-ce que c’est juste de dire, François, que les dix premiers titres du top 10 et les titres les plus performants dans 10 prochaines années seront probablement différents ? 

François Doyon La Rochelle : 

Oui James, il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'elles auront changé. 

James Parkyn : 

Qu’est-ce que tu dirais alors aux investisseurs François, qui pourraient encore être tentés d'acheter ces actions ? 

François Doyon La Rochelle :  

James, il est possible qu'ils continuent à surperformer le marché à court terme. Toutefois, à long terme, je ne pense pas qu'ils puissent raisonnablement s'attendre à ce genre de rendements exceptionnels de la part des « Sept Magnifiques ». La valorisation de leurs actions est aujourd'hui considérée comme élevée et lorsqu'elle l'est, les rendements futurs espérés sont plus faibles. Les investisseurs doivent se rappeler que les rendements historiques annualisés pour l'indice S&P500 depuis 1926 ont été de 10,3 % et que, seulement pour 2023, ces titres ont généré un rendement pondéré en fonction de la capitalisation boursière de 76 %. Les investisseurs ont souvent des attentes irréalistes en matière de performance pour ces types d'actions de croissance.    

À ce sujet, Dimensional a étudié la surperformance annualisée moyenne des entreprises avant et après la première année où elles sont devenues l'une des dix plus grandes entreprises américaines. 

James Parkyn : 

Et c’est quoi leurs résultats ? 

Francois Doyon La Rochelle : 

De 1927 à 2023, le rendement annualisé moyen de ces titres, pour les dix années précédant leur entrée dans le top 10, a été supérieur de 11,8 % à celui du marché. Pour les trois années précédant leur entrée dans le top 10, leur performance était supérieure de 27,2 % à celle du marché. Mais voilà que, trois ans après leur entrée dans le top 10, leur surperformance n'était plus que de 0,5 % par rapport au marché, et dix ans plus tard, ces actions affichaient une sous-performance annualisée de 1,5 % en comparaison à celle du marché. 

Des recherches similaires menées par Antti Petajisto, PHD et ancien professeur à l'université de Yale, aboutissent à des conclusions similaires. Dans son article intitulé « Underperformance of Concentrated Stock Positions », il écrit et je cite : « Pour les titres qui ont fait partie des 20 % les plus performants au cours des cinq dernières années, le rendement médian ajusté au marché des dix années suivantes, tombe à -17,8 %, soit une sous-performance de 1,94 % par an ». Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le rendement médian ajusté au marché sur dix ans des récents titres gagnants a été négatif 93 % du temps ». 

James Parkyn : 

Sur la base de ces recherches, François, je pense qu’on peut conclure que les investisseurs ne devraient pas courir après les performances passées de ces titres à succès. Ils doivent être très conscients des conséquences de leur peur de manquer le bateau. Je pense que les investisseurs devraient rester disciplinés pour éviter de commettre ce type d'erreur comportementale. Dans de tels moments, il est toujours bon de se référer aux sages paroles de Warren Buffett. En 2018, lors de la réunion annuelle de Berkshire, interrogé par un investisseur sur le fait qu’il n’avait pas acheter Microsoft, Warren Buffett a donné une longue réponse, mais a terminé en disant : « Nous avons raté beaucoup d’opportunités par le passé, et je soupçonne que nous en raterons encore beaucoup d'autres à l'avenir. » Ce qu'il veut dire par là, c'est qu'il y aura toujours des titres à succès. 

Francois Doyon La Rochelle : 

Oui, et je pense que ça en dit beaucoup et que c'est un bon état d'esprit à avoir. Si vous avez construit votre portefeuille avec des FNB largement diversifiés, vous avez bénéficié de la performance de ces titres surperformants, et vous bénéficierez sans aucun doute des prochains titres qui surperformeront à l'avenir. C’est agréable de frapper un home run, mais ce n’est pas un plan d'investissement à long terme. 

James Parkyn :  

Exactement François. Les investisseurs doivent se concentrer sur leurs objectifs à long terme, diversifier leur portefeuille à travers de nombreuses classes d'actifs et de nombreux pays, et suivre notre mantra en adoptant une « mentalité d'investisseur à long-termes ».      

3) REVUE DE LA LETTRE ANNUELLE DE WARREN BUFFETT : 

Francois Doyon La Rochelle : 

Pour notre deuxième sujet, on va revoir la lettre annuelle de Warren Buffett aux actionnaires de Berkshire Hathaway.  La revue de cette lettre est un rituel annuel pour de nombreux investisseurs.  Warren Buffett écrit ces lettres depuis 1965. De nombreux livres sérieux ont été publiés au fil des ans, qui étudient ces lettres pour résumer les perles de sagesse de Warren sur le thème de l'investissement.  Je crois, James, qu’on avait sauté la revue l'année dernière en faveur d'autres sujets, mais cette année, on a estimé qu'il était grand temps d’y revenir pour nos auditeurs.  Pourquoi ? Parce qu’on pense que tous les investisseurs, y compris nous-mêmes, qui ont une philosophie d'investissement disciplinée, peuvent apprendre des idées de Warren. 

James Parkyn : 

Absolument, François.  Pour moi, la lecture des lettres annuelles de Warren Buffett est toujours fascinante. On se rend compte que les entreprises détenues par Berkshire peuvent être expliquées dans un langage simple. Il n’a pas besoin du jargon si omniprésent dans l'industrie des services financiers. 

François Doyon La Rochelle : 

Puisqu’il écrit ses lettres aux actionnaires depuis près de 60 ans, je pense que leur lecture offre une perspective historique fascinante. Nos auditeurs doivent savoir qu'elles sont toutes facilement accessibles en ligne gratuitement.  Alors, James, par où veux-tu commencer la revue de la lettre de cette année ? 

James Parkyn :  

Cette année, François, il y a beaucoup de choses à dire parce qu'il y a beaucoup de nouvelles.  Dans la Lettre de 2023, Warren a écrit un hommage à son défunt partenaire, et je cite : « Charlie était l’architecte de l’actuel Berkshire, et j'ai agi en tant qu’entrepreneur général pour mener à bien la construction quotidienne de sa vision ». 

François Doyon La Rochelle :  

Le décès de Charlie Munger, son partenaire de longue date, a été un événement majeur dans le monde du Berkshire. Nombreux sont ceux qui ne se rendent pas compte de l’importance du rôle de Charlie Munger dans ce partenariat. 

James Parkyn :  

François, pour nos auditeurs, je citerai à nouveau Warren dans la Lettre de 2023 : « Néanmoins, Charlie, en 1965, m'a rapidement conseillé : « Warren, oublie l'idée d'acheter une autre société comme Berkshire. Mais maintenant que tu contrôle Berkshire, ajoutes-y des entreprises merveilleuses achetées à des prix justes et renonce à acheter des entreprises justes à des prix merveilleux. En d'autres termes, abandonne tout ce que tu as appris de ton héros, Ben Graham. » 

Francois Doyon La Rochelle : 

Pour nos auditeurs Benjamin Graham est connu comme étant le « père de l'investissement axé sur la valeur ». Il a écrit deux des papiers à la base de la discipline : Security Analysis with David Dodd et The Intelligent Investor. 

James Parkyn : 

La citation de Warren Buffett se poursuit : «Bien des années plus tard, Charlie est devenu mon partenaire dans la gestion de Berkshire et, à plusieurs reprises, il m'a ramené à l’ordre lorsque mes vieilles habitudes refaisaient surface ».  Je pense que cette citation François en dit long sur l'influence que Charlie Munger a exercée sur Warren Buffett. 

Francois Doyon La Rochelle :  

C'est ce qu'il faut retenir pour nos auditeurs. Ils doivent avoir un état d'esprit d'investisseur, c'est-à-dire qu'idéalement, ils veulent acheter des titres et les conserver pour toujours. Ce principe est au cœur de notre philosophie d'investissement. Vous voulez éviter le piège d’être influencer par le bruit des médias financier. Pour nos auditeurs qui voudraient en savoir plus sur Charlie Munger, il existe un excellent livre intitulé « Poor Charlie's Almanack : The Wit and Wisdom of Charles T. Munger", édité par Peter Kaufman.  La quatrième édition vient d'être publiée. James, peux-tu maintenant expliquer à nos auditeurs ce que fait Berkshire ? 

James Parkyn :  

Eh bien François, Warren Buffett l'explique clairement dans la Lettre de cette année, dans une section intitulée « Ce que nous faisons ».  Je cite la lettre : « Notre objectif à Berkshire est simple : Nous voulons détenir tout ou une partie des entreprises qui jouissent d'une bonne situation économique, fondamentale et durable. Dans le cadre du capitalisme, certaines entreprises prospéreront pendant très longtemps, tandis que d'autres se révéleront être des gouffres. Il est plus difficile qu'on ne le pense de prédire quels seront les gagnants et les perdants. Et ceux qui vous disent qu'ils connaissent la réponse sont généralement soit des personnes qui se font des illusions, soit des vendeurs d'huile de serpent ». 

François Doyon La Rochelle : 

C’est un autre point très important pour nos auditeurs. La sélection des titres est une compétence très rare et difficile à reproduire. Nous savons que Warren Buffett n'est pas un fan de Wall Street et des prévisionnistes de marché.  Il a toujours recommandé aux investisseurs de placer leur argent dans un indice comme le S&P 500. James, Warren Buffett et Charlie Munger ont donc partagé de nombreuses leçons importantes sur l'investissement au fil des ans.  Quelle leçon Warren met-il en avant cette année ? 

James Parkyn : 

François, Warren Buffett est très clair sur une règle clé qu'il ne transgresse jamais.  Dans la Lettre de cette année, je le cite : « Une règle d'investissement chez Berkshire n'a pas changé et ne changera pas : Ne jamais risquer une perte permanente de capital. Grâce à la croissance de l’économie américaine et à la puissance des intérêts composés, le domaine dans lequel nous opérons a été - et sera - gratifiant si vous prenez quelques bonnes décisions au cours de votre vie et si vous évitez les erreurs graves ». 

François Doyon La Rochelle : 

Ça me paraît tout à fait logique, James, et c'est pourquoi nous diversifions toujours largement les portefeuilles de nos clients afin d'éviter toute perte permanente de capital. Encore une fois, les personnes qui investissent dans des actions individuelles courent toujours le risque, parce qu'on ne sait pas ce qu'on ne sait pas, il y a toujours un risque de voir son capital se dilapider. James, beaucoup de nos auditeurs se demandent probablement comment Berkshire a pu devenir aussi gros. 

James Parkyn :  

C'est une belle histoire, François.  Je rappelle à nos auditeurs qu’on ne fait pas de stock picking et qu’on ne recommande en aucun cas l'achat ou la vente d'actions Berkshire.  Berkshire a si bien performé qu'elle est maintenant la 7ème plus grande société publique sur les marchés américains en termes de capitalisation boursière.   

François Doyon La Rochelle :  

En tant que 7ème plus grand titre sur le marché américain, Berkshire a un poids de 1,7% dans l'indice S&P 500 et un poids de 1,5% dans le FNB de Vanguard sur le marché total américain en date du 31 mars 2024.  Les investisseurs comme nos clients dans ces FNB ont bénéficié de la détention d'actions Berkshire.   

James Parkyn : 

Certains de nos auditeurs seront peut-être surpris d'apprendre que l'une des raisons pour lesquelles Berkshire est aujourd'hui 7e rang est que les actions Apple représentaient près de 50 % du portefeuille d'actions publiques de Berkshire à la fin de l'année. Pour que les choses soient claires pour nos auditeurs, il ne s'agit pas de 50 % de la valeur totale de Berkshire. Comme on l’a déjà mentionné, Apple est la deuxième plus grande société publique sur les marchés américains en termes de capitalisation boursière.    

Francois Doyon La Rochelle : 

L'histoire derrière l'investissement de Warren Buffett dans Apple est vraiment fascinante.  James, est-ce que tu peux expliquer à nos auditeurs comment ça s'est passé ? 

James Parkyn : 

Après un premier achat de près de 10 millions d'actions d'une valeur d'environ 1 milliard de dollars en 2016, Berkshire a ensuite augmenté sa position plus tard dans l'année. Puis en 2017 et 2018, elle a intensifié ses achats en dépensant environ 36 milliards de dollars. Berkshire a ensuite réduit certaines de ces participations. L'opération a été très fructueuse pour l’entreprise. Aujourd'hui, la participation de 5,9 % de Berkshire dans Apple vaut environ 157 milliards de dollars U.S. Berkshire est assise sur environ 120 milliards de dollars américains de gains théoriques, ce qui représente probablement la plus grosse somme jamais gagnée par un investisseur ou une entreprise sur un seul titre. Rien dans la longue carrière de Buffett ne s'en rapproche. 

Francois Doyon La Rochelle : 

C'est incroyable, James, mais est-ce que ça n’augmente pas le risque de Berkshire ? 

James Parkyn : 

Dans un article du WSJ publié le 3 mai 2024 et intitulé « Apple Is Buffett's Best Investment. It's Also Now One of His Riskiest » (Apple est le meilleur investissement de Buffett, mais aussi l'un de ses plus risqués), Gregory Zucherman répond à cette question.  Il affirme que « Berkshire a obtenu un rendement annualisé de plus de 26 % grâce à Apple, dividendes compris, dépassant un gain de 12,9 % pour le S&P 500 au cours de la même période ». 

Pour répondre à la question de François, à savoir si le titre Berkshire est désormais plus risqué, c'est vraiment mal comprendre la façon dont Warren Buffett conçoit l'investissement. D'une part, comme tu le souligne François, les grandes entreprises qui sont dans le top 10, avec le temps, commencent à sous-performer par rapport au marché. La position d'Apple est un pari concentré, et nous savons tous que Warren Buffett est un adepte de la discipline de Buy and Hold pour toujours. Cela dit, il a déjà commencé à réduire sa position. 

François Doyon La Rochelle : 

Historiquement Warren Buffett et Charlie Munger ont évité les titres technologiques.  Ils disaient qu'ils étaient trop difficiles à évaluer.  Qu'est-ce qui a changé ? 

James Parkyn : 

François, c'est encore pour moi un exemple parfait pourquoi il est si difficile d’être un « Stock Picker ». Chris Davis, qui siège au conseil d'administration de Berkshire, est cité dans le même article du WSJ. Il a déclaré : « La capacité de Warren à changer d'avis est un atout majeur, car c’est ce que les investisseurs trouvent le plus difficile. La plupart d'entre nous, on s’ancre dans nos déclarations passées, mais Apple est un exemple puissant de l'importance d'être ouvert au changement ». 

En effet, Warren Buffett a démontré au fil des ans qu'il possède la capacité unique de prendre la décision de vendre si les fondamentaux sous-jacents changent. Un exemple parfait : dans la lettre de cette année, Warren Buffett a admis avoir commis une erreur majeure avec Berkshire Hathaway Energy, un investissement majeur qu'il contrôle à 100 %. L’environnement réglementaire a changé dramatiquement et il regrette maintenant son investissement. 

François Doyon La Rochelle : 

Berkshire est si grand que l'univers des entreprises qu'il peut acheter en quantités suffisantes pour affecter ses rendements est limité. Apple, avec une valeur au marché de près de 600 milliards de dollars au début de l'année 2016, quand il a fait ses premiers achats, répondait à ces critères. Il est toujours étonnant que, malgré qu'il n’ait pas été un investisseur de la première heure dans Apple, qu’il a gagné autant d'argent avec ce titre. James, qu’est-ce que Warren Buffett dit aujourd'hui sur les perspectives de l'action Berkshire ? 

James Parkyn :  

Warren Buffett est très clair sur les perspectives.  Dans la Lettre de 2023, il prévient que Berkshire Hathaway n'a « aucune possibilité de réaliser des performances extraordinaires ».  Il a déjà souligné que la taille de Berkshire - qui a terminé l'année 2023 avec plus de 560 milliards de dollars de capitaux propres sur son bilan - limitera sa croissance future. En 1984, Buffett avait prévenu que Berkshire était suffisamment grande pour que sa croissance ralentirait. En 1990, il s'exprimait ainsi : « Un taux de croissance élevé finit par forger son propre ancrage. » 

Francois Doyon La Rochelle :  

Oui, James, mais malgré ce qu'il a dit à l'époque, le titre de Berkshire ont connu une hausse spectaculaire à partir de 1984.  Ces dernières années, les performances de Berkshire ont été beaucoup plus proches de celles du marché.  En 2023, les actions Berkshire ont rapporté 15,8 % contre 26,3 % pour le S&P 500.  Cependant, jusqu'à présent, en 2024, les actions Berkshire ont dépassé le marché. 

Que doivent retenir nos auditeurs de tout ça James ? 

James Parkyn : 

Il y a plusieurs leçons importantes à tirer, François.  Tout d'abord, ce que Warren Buffett a réalisé avec Berkshire, est qu’elle n’est égalée par aucun autre investisseur.  Il est l'exemple parfait d'un talent qui a su surpasser le marché sur le long terme. Ce talent est très rare et très difficile à trouver. Warren Buffet a toujours dit que la meilleure option pour les investisseurs est d'investir dans un indice comme le S&P 500.  Il est très clair que pour obtenir les meilleurs résultats, les investisseurs doivent adopter un état d'esprit d'achat et de conservation à long terme. 

La deuxième leçon pour nos auditeurs nous vient de Jason Zweig, qu’on a souvent cité dans notre podcast. Il a écrit un excellent article dans le WSJ du 3 mai intitulé « Warren Buffett ne se contente pas de choisir des bons titres ».  Il déclare dans cet article, et je cite : « La recherche d'un excellent « Stock Picker » est nécessaire, mais pas suffisante. Il faut aussi trouver un grand « Stock Picker » qui ne soit pas un pickpocket ». Dans cet article, il souligne que si l'on compare Warren Buffett aux fonds de couverture ou aux fonds de capital privé et à leurs frais scandaleusement élevés, les investisseurs doivent se méfier des gestionnaires de fonds qui se présentent comme agissant exactement comme Warren Buffett. 

Francois Doyon La Rochelle : 

C'est une leçon très importante pour nos auditeurs, James. Très souvent, dans les médias financiers, on entend dire : « Oh, nous investissons comme Warren Buffett ». En réalité, ce n'est pas le cas. Comme le souligne Jason Zweig, « pour Buffett, sa stratégie commerciale a engendré une structure qui le distingue des autres gestionnaires de fonds - et qui a permis aux actionnaires de Berkshire de gagner beaucoup d'argent ».  Il va même jusqu'à calculer l’impact pour les actionnaires de Berkshire si elle avait facturé des frais de gestion similaires à ceux des fonds de couverture (Hedge Funds). Voici un autre extrait de l'article : « En d'autres termes, si Buffett avait facturé des frais de gestions similaires à ceux des fonds de couverture, les investisseurs de Berkshire n'auraient gagné qu'environ 10 % de la richesse dont ils ont bénéficié. » 

James Parkyn : 

C'est incroyable.  Il ne serait resté que 10 % du gain réel pour les investisseurs.  Une des leçons à retenir est donc qu'il faut se méfier des frais élevés, surtout aujourd'hui où le secteur des services financiers s'efforce de pousser les investisseurs vers des stratégies alternatives assorties de frais très élevés. 

François Doyon La Rochelle :  

Étant donné que Berkshire est une société de holding cotée en bourse, et non un fonds commun de placement ou un fonds spéculatif, elle ne prélève pas de frais de gestion. Jason Zweig souligne que le secteur de la gestion de fonds est structuré exactement à l'opposé. Il ajoute : « Buffett n'a jamais eu à s'inquiéter que les investisseurs l'inondent de trop d'argent lorsque le marché est à la hausse, ou qu'ils le lui retirent lorsqu'il est à la baisse. La plupart des autres fonds disposent d'un capital inconstant ; Berkshire dispose d'un capital permanent ». 

James Parkyn :  

François, j'aimerais terminer ce segment en partageant avec nos auditeurs que je suis toujours étonné que les investisseurs continuent d'ignorer les conseils de Buffett. Ce qu'il recommande avant tout, c'est d'adopter un état d'esprit d'investisseur axé sur le long terme, d'investir et de détenir os placement aussi longtemps qu'il est raisonnable de le faire et de s'assurer que l'on évite les fonds d'investissement dont les frais sont élevés. Cette liste sur la discipline d'investissement que préconise Warren Buffet est loin d'être exhaustive, mais je crois François que ça résume l'essentiel. 

 4) CONCLUSION :

François Doyon La Rochelle : 

Merci James Parkyn d’avoir partagé ton expertise et ton savoir aujourd’hui. 

James Parkyn :  

Avec plaisir. François. 

François Doyon La Rochelle :  

Hé bien c’est tout pour ce 64ième épisode de Sujet Capital!  Nous espérons que vous avez aimé. 

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A bientôt.