1)   INTRODUCTION :

François Doyon La Rochelle:

Bienvenue à Sujet Capital, un balado mensuel à propos de la gestion passive de portefeuille et de la planification financière et fiscale pour les investisseurs à long terme.

Vos hôtes pour ce balado sont James Parkyn et moi-même François Doyon La Rochelle, tous deux gestionnaires de portefeuilles avec PWL Capital.

Au programme aujourd’hui pour l’épisode #72:

Nous discuterons des leçons d’investissement de 2024.

Bonne écoute!

2)   LES LEÇONS D’INVESTISSEMENT DE 2024 :

François Doyon La Rochelle:

Je vais commencer. Dans notre dernier Podcast #72, on a examiné les résultats des marchés des capitaux pour 2024 et, ce faisant, on a souligné les principaux événements économiques et géopolitiques qui, selon nous, ont influencé les résultats des marchés des capitaux l'année dernière. Chaque année apporte des leçons précieuses aux investisseurs qui nous rappellent l'importance de rester disciplinés et concentrés sur le long terme et d'éviter de se laisser décourager par les bruits à court terme. James, poursuivons donc notre tradition annuelle en partageant les leçons d'investissement de l'année passée...donc pour 2024.

James Parkyn:

François, les marchés financiers à chaque année nous donnent des leçons et souvent ce sont les mêmes qu’on réapprend. Comme le dit souvent notre ami et auteur Larry Swedroe : « Avec une grande fréquence, les marchés offrent des cours de rattrapage couvrant les leçons qu'ils ont enseignées les années précédentes. C'est pourquoi l'un de mes dictons favoris est qu'il n'y a rien de nouveau dans l'investissement, seulement des faits historiques sur l'investissement qui vous échappent ».  Aujourd'hui, on va partager nos cinq principales leçons de 2024. Pour préparer la liste de cette année, on a passé en revue nos leçons de 2022 et 2023. Sans surprise, François, toutes les leçons de cette année se retrouvent dans celles des deux dernières années.

François Doyon La Rochelle:

Oui mais malheureusement, James, trop d'investisseurs ne parviennent pas à tirer les leçons.  Ils continuent à faire les mêmes erreurs.

On commence par les leçons de cette année. 

La 1ère leçon est : Personne ne peut systématiquement faire des prévisions de marché justes.

On l’a souligné dans notre dernier podcast sur les résultats du marché 2024, en voyant comment les prévisionnistes des grandes institutions financières se sont comportés l'année dernière.  Leurs prévisions étaient terribles. 

En 2022 et en 2023, on a également dit que personne ne peut prévoir l'avenir. On ne le dira jamais assez : évitez de prêter attention à toutes les prévisions pour 2025. 

James Parkyn:

Pour ma part François, je pense qu’il serait bon de répéter une citation du podcast de l'année dernière. Jason Zweig, dans un article du WSJ du 16 décembre 2023 intitulé « Mirror, Mirror on the Wall who knew Stocks would fall ? « D'innombrables intuitions et pressentiments nous traversent l'esprit au cours d'une année. Nous nous souvenons naturellement de celles qui se sont avérées justes. La multitude d'autres intuitions qui s'avèrent erronées se retrouvent dans notre poubelle mentale ». 

François Doyon La Rochelle:

C'est un classique James.  Aujourd'hui, de nombreux investisseurs ont besoin de se confronter à la réalité.  En fait, ils devraient en faire un rituel annuel. Une autre façon de le dire est de faire abstraction du bruit. Ce faisant, vous vous donnerez les meilleures chances de réussite à long terme en matière d'investissement. Il y aura toujours des incertitudes sur les marchés et des grands titres qui encourageront les investisseurs à faire des transactions dans leurs portefeuilles qui ne sont peut-être pas dans leurs meilleurs intérêts.

 James Parkyn:

Jason Zweig poursuit en disant « Ce schéma, que les psychologues appellent le biais de rétrospection, nous donne l'impression d'avoir prévu l'avenir depuis le début, que ce qui s'est passé était inévitable et que quiconque ne l'a pas vu venir est un imbécile. C'est presque irrésistible mais c'est une illusion ».

David Booth, cofondateur de Dimensional, a récemment écrit que : « Même avec une boule de cristal, les marchés sont imprévisibles. Dans un contexte de tensions géopolitiques, de défis économiques et d'incertitudes électorales, 2024 a prouvé une fois de plus la résilience des marchés financiers publics et le pouvoir de l'ingéniosité humaine. Les marchés ont continué à faire ce qu'ils font le mieux : traiter efficacement l'information et fixer des prix justes, récompensant ainsi les investisseurs à long terme par des rendements positifs.

François Doyon La Rochelle:

Ceci nous amène à la leçon n°2 : les multiples sur les titres ne peuvent pas être utilisées pour prévoir la direction des marchés.

Larry Swedroe a récemment écrit un article pour Morningstar intitulé « US Stocks Have Outperformed the World. History Shows That Success Can Be Fleeting». Je le cite : « Ceci dit, il convient de noter que les actions américaines se négocient aujourd'hui à environ 2,7 fois le chiffre d'affaires et 4 fois la valeur comptable, soit le même multiple que celui du Japon au plus fort de la bulle des années 1980. Les marchés internationaux, quant à eux, se négocient à des multiples beaucoup plus faibles : environ 1,2 fois le chiffre d'affaires et 1,6 fois la valeur comptable.

James Parkyn:

Pour de nombreux auditeurs, c'est peut-être beaucoup de jargon. Ce que ça veut dire, est que les actions américaines sont dispendieuses comparativement aux actions internationales. Larry nous dit également qu'environ 75 % de la surperformance relative des États-Unis est due à des changements dans la valorisation des actions. Seul un petit pourcentage de la surperformance provient des fondamentaux.

François Doyon La Rochelle:

La majeure partie de la surperformance du marché américain est due au fait que les investisseurs sont devenus plus optimistes à l'égard des actions américaines.  Nous pouvons dire que le biais de rétrospection joue un rôle et que les investisseurs continuent de faire des projections en se basant sur les performances historiques récentes. Mais le sentiment des investisseurs peut changer rapidement.

James Parkyn:

Si l'augmentation des multiples entraîne une hausse des rendements réalisés, elle peut aussi se traduire par une baisse des rendements futurs espérés, alors même que d'autres régions présentant des multiples comparativement plus faibles peuvent s'attendre à des rendements futurs espérés plus élevés.

François Doyon La Rochelle:

Larry poursuit en disant : « Si ces cycles de surperformance et de sous-performance sont prévisibles à un haut niveau, il n'existe pas de boule de cristal nous permettant de prévoir exactement le moment où chaque changement se produira. La conclusion logique est que les investisseurs devraient être diversifiés au niveau international, en détenant un mélange de classes d'actifs américaines et internationales, plutôt que de parier sur la surperformance de l'une par rapport à l'autre.

James Parkyn:

Malheureusement, François, sous l’influence du biais de récence, de nombreux investisseurs ont tendance à acheter ce qui a le mieux performé au cours de la période la plus récente (à des multiples plus élevées et donc à des rendements espérés plus faibles) et à vendre ce qui a moins bien performé (à des multiples plus faibles et donc à des rendements espérés plus élevés).

François Doyon La Rochelle:

C'est exactement le contraire de l'approche fondamentale de l'investisseur qui consiste à « Buy low, sell high »

Leçon n° 3 : la gestion active est perdante, que les marchés soient haussiers ou baissiers.

James Parkyn:

Jack C. Bogle, fondateur de Vanguard, a saisi la puissance de l'indexation par une simple analogie : « Ne cherchez pas l'aiguille, achetez la botte de foin ».

En se référant à l'histoire des marchés financiers, les investisseurs peuvent constater que la concentration - pensez aux actions du groupe des Sept Magnifiques (Le Mag 7) - s'est déjà produite dans le passé sur les marchés des actions. En fait, seulement un petit pourcentage, soit 4 % des entreprises, ont été à l'origine de la moitié des rendements des marchés d'actions au cours des presque 100 dernières années. On a abordé ce sujet dans notre podcast n° 67, qui s'appuie sur les recherches du professeur Bessembinder.     

François Doyon La Rochelle:

Une autre façon d'exprimer ce que Jack Bogle dit, c'est de profiter des avantages de posséder la botte de foin et chacune des aiguilles. Donc c'est-à-dire de détenir le marché dans son ensemble, ce qui implique de détenir toutes les actions individuelles en fonction de leurs pondérations en termes de capitalisation boursière.

James Parkyn:

Lorsqu'il a inventé cette expression, François, la plupart des investisseurs étaient soit indiciels, soit actifs, et très très majoritairement actifs. Cette répartition du capital par les investisseurs a entraîné des différences significatives dans l'exposition et la pondération des entreprises et des secteurs. Les investisseurs actifs détenaient généralement un beaucoup plus petit nombre d'actions dans leurs portefeuilles, en d’autres mots, ils ont moins d'aiguilles.

En détenant la botte de foin ou le marché dans son ensemble, les investisseurs ont la plus grande probabilité d'avoir des pondérations en fonction de la capitalisation boursière des marchés qui sont dérivées du consensus de tous les investisseurs. Comme on l’a dit à plusieurs reprises, historiquement les indices boursiers sont très difficiles à battre.

François Doyon La Rochelle:

James, j'ai une autre excellente citation de David Booth, cofondateur de Dimensional, qui soutient la position de Jack Bogle et qui montrent l’inefficacité de la gestion active.  Je le cite : « Malgré les preuves accablantes et l'histoire convaincante du contraire. Lorsque l'économiste Michael Jensen a publié son article de référence en 1968, qui montrait que les « stock pickers » n'ajoutaient aucune valeur, d'autres universitaires ont rapidement confirmé ses idées. Plus de cinq décennies et 50 ans de données plus tard, la théorie tient toujours. Certains « stock pickers » connaissent du succès, mais il n’est pas possible de les identifier en avance. Nous ne pouvons pas séparer la compétence de la chance. La sélection des actions ou le « Stock picking » s'apparente davantage à un jeu de hasard qu'à un investissement ».

James Parkyn:

Larry soutient que 2024 a été une autre année où les gestionnaires actifs ont eu une formidable opportunité de générer de l'alpha - jargon pour battre le marché - grâce à la grande dispersion des rendements entre les actions les plus performantes et les moins performantes. Il cite en exemple l'indice S&P 500 qui a généré un rendement de 25,0 % en USD pour l'année, dividendes compris, alors que les actions des cinq sociétés les plus performantes ont augmenté d'au moins 135 %. Pour surperformer, un gestionnaire actif n'aurait eu qu'à surpondérer ces titres gagnants, chacun d'entre eux ayant surperformé l'indice d'au moins 110 points de pourcentage.

François Doyon La Rochelle:

Mais malheureusement, James, les investisseurs dans les fonds actifs continuent de payer pour des faux espoirs au lieu de s’appuyer les preuves historiques.

Et maintenant, on passe à la leçon n°4 : la diversification fonctionne toujours ; parfois on aime les résultats, parfois moins.

James Parkyn:

Ceci nous ramène à ce que tu mentionnais François dans notre dernier podcast à propos de la surperformance du marché des actions américaines. Plus précisément, la surperformance par rapport aux marchés canadiens, internationaux développés et émergents au cours de la dernière décennie, et plus particulièrement l'année dernière, nous amène à nous interroger sur les avantages de la diversification. L’historique des marchés financiers nous informe qu’il y aura toujours un secteur, un pays ou autre composante du marché qui surperformera votre portefeuille au cours d'une année donnée. 

François Doyon La Rochelle:

Oui, et lorsque ça se produit, notre discipline et notre patience sont mises à l'épreuve, il faut à ce moment se rappeler des raisons pour lesquelles vous avez correctement diversifié votre portefeuille en premier lieu. La diversification sert à réduire le risque sans réduire les rendements espérés à long terme. Même dans des années comme 2023 et 2024, un investisseur en actions américaines pourrait être mécontent de ne pas avoir investi tous ses œufs dans les Sept Magnifiques.

James Parkyn:

François, bien que la théorie économique et les preuves empiriques suggèrent que la stratégie la plus prudente consiste à diversifier ses placements à l'échelle mondiale, il faut reconnaître que pour de nombreux investisseurs, la diversification internationale peut s’avérer peu convaincante. La raison en est que même un portefeuille bien conçu et diversifié connaîtra inévitablement des périodes de faible performance. Larry Swedroe dit, et je cite, « le bruit des médias mettra alors à l'épreuve votre capacité à adhérer à votre stratégie ».  Et malheureusement, lorsqu'il s'agit de juger de la performance, je sais par expérience que la plupart des investisseurs pensent que trois ans, c'est long, cinq ans, c'est très long, et dix ans, c'est une éternité ».

François Doyon La Rochelle:

James, il est essentiel que nos auditeurs comprennent la logique et les avantages de la diversification mondiale, ainsi que les « risques de la diversification ». Il y aura toujours ce qu’on appelle le risque de « tracking error » ou le risque de générer un rendement inférieur à un indice particulier, exemple le S&P 500 en 2024. Le fait d'être conscient de ce risque vous aidera à rester discipliné.

James Parkyn:

Je suis d'accord avec toi François, les investisseurs ne peuvent pas fuir tous les risques, ils peuvent seulement choisir ceux qu'ils veulent prendre. L'absence de diversification au niveau mondial crée le risque que les actions américaines suivent les traces du Japon et soient le prochain pays à sous-performer au cours des 30 prochaines années. Mettre tous ses œufs dans le même panier n'est pas une stratégie prudente, en dépit de notre perception de nos connaissances.  Une autre citation classique me vient à l'esprit : « Avant de commettre l'erreur de confondre le familier avec le sûr, nul ne sait quel pays connaîtra une période prolongée de sur ou de sous-performance. »

François Doyon La Rochelle:

Pour les investisseurs, le fait d'accorder plus d'importance aux résultats récents qu'aux données historiques abouti souvent à de mauvaises décisions. Par exemple, surpondérer les actions internationales en 1990, les actions américaines au sommet de la bulle technologique en mars 2000 ou encore les actions internationales en 2008.

James Parkyn:

J'ajouterais à ça les données des dernières recherches académiques. Les auteurs Asness, Israelov et Liew, dans leur article de 2023 du Journal of Portfolio Management, intitulé « International Diversification-Still Not Crazy After All These Years », ont mis à jour leur article précédent avec les données jusqu'en 2022 et ont conclu que « la diversification internationale protège assez bien les investisseurs sur le long terme ». Pour ces universitaires, le long-terme c’est plus que 10 ans.

François Doyon La Rochelle:

Passons à notre dernière leçon n° 5 : Restez fidèle à votre plan d’investissement à long-terme et conservez votre état d'esprit d'investisseur.

Il est impossible de prédire la direction des marchés, et il est souvent difficile d'imaginer une reprise après un correction ou lorsqu'il y a beaucoup d'incertitude quant à la direction de l'économie. Mais l'histoire plaide en faveur de la persévérance et de la patience.

James Parkyn:

Je citerai à nouveau David Booth de Dimensional : « La performance du marché en 2024 est le reflet de la puissance de l'ingéniosité humaine. L'indice S&P 500 a affiché un rendement de 35,6 % (en dollars canadiens), tandis que le marché boursier mondial, mesuré par l'indice MSCI All Country World, a progressé de 26,8 % (en dollars canadiens). Même les obligations, après avoir connu des difficultés au début de la décennie, ont affiché des rendements solides (6,6 % en CAD, selon l'indice Bloomberg Global Aggregate Bond).

François Doyon La Rochelle:

La preuve est faite : les investisseurs qui ont des portefeuilles largement diversifiés et qui sont restés investis malgré la volatilité des dernières années ont été récompensés pour leur patience et leur discipline.

L'histoire récente des marchés plaide en faveur de suivre un plan à long-terme. De beaux rebonds comme ceux que nous avons connus en 2023 et une autre année faste en 2024 après une année 2022 difficile, nous rappellent très clairement que les investisseurs doivent rester disciplinés et se concentrer sur le long terme et ne pas se laisser décourager par les bruits du moment. C'est le seul moyen fiable de profiter des avantages à long terme offerts par les marchés.

James Parkyn:

C'est pourquoi, François, selon moi les investisseurs devraient recourir aux services d'un bon conseiller pour les aider à ne pas faire des erreurs couteuses.

Je pense qu'il serait utile de répéter une citation de Morgan Housel, l'auteur du livre « The Psychology of Money », que nous avons partagée avec nos auditeurs dans le podcast Leçons de 2022 : « Le pessimisme semble toujours plus intelligent que l'optimisme car l'optimisme ressemble à un « pitch » de vente alors que le pessimisme ressemble à quelqu'un qui essaie de vous aider.  L'avenir est incertain, c'est pourquoi ça peut être effrayant.  

François Doyon La Rochelle:

Nous rappelons également à nos auditeurs James notre mantra selon lequel nos auditeurs doivent avoir un « état d'esprit d'investisseur » et continuer à investir et rebalancer aux besoins, en respectant son plan d’investissement à long terme. 

3)   CONCLUSION

François Doyon La Rochelle:

Merci James Parkyn d’avoir partagé ton expertise et ton savoir aujourd’hui.

James Parkyn:

il m’a fait plaisir Francois.

François Doyon La Rochelle:

Hé bien c’est tout pour ce 72ième épisode de Sujet Capital!  Nous espérons que vous avez aimé.

N’hésitez pas à nous envoyer vos questions et suggestions. Vous pouvez nous joindre par courriel à: sujetcapital@pwlcapital.com

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